Dimanche 7 décembre 2003 - 2ème dimanche de l’Avent C

Luc avait annoncé en tête de son évangile, que pour son enquête sur Jésus, il se renseignerait très précisément

Baruc 5,1-9 - Philippiens 1,4-11 - Luc 3,1-6
dimanche 7 décembre 2003.
 

Luc avait annoncé en tête de son évangile, que pour son enquête sur Jésus, il se renseignerait très précisément de tout auprès de ceux qui ont vécu avec le Christ. C’est pourquoi nous avons au début de cette lecture une liste précise en effet, des puissances politiques et religieuses de l’époque. Mais ce n’est pas uniquement un soucis de précision. Dans la même et longue phrase, on nous donne les noms de l’empereur, du gouverneur, des princes, des grands prêtres, et contraste saisissant : « La parole de Dieu fut adressée dans le désert à Jean. »

De là nous vient déjà un double enseignement. Tout d’abord, il y a une contestation des puissants de ce monde ; ils vivent dans des palais, entre leurs mains, ils tiennent les pouvoir mondains, mais ce n’est que sable qui coule entre leurs doigts. De cette histoire extraordinaire qui commence, ils ne saisiront rien. Il faut situer Jean-Baptiste dans cette tradition de contestation qui agite le peuple d’Israël. A l’époque les princes sont de la dynastie des Asmonéens. Ils n’avaient pas beaucoup d’amis, excepté l’occupant romain. On leur reprochait leur écœurante tiédeur religieuse et leur compromissions avec les pouvoirs en place. Les grands contestataires de ces compromis, ce sont les pharisiens. Et il y avait aussi les esséniens, un groupe très fervent qui s’était retiré dans un endroit désert dont vous avez entendu parlé, Qumran. C’est dans cet état d’esprit qu’on peut relire les paroles de Marie : « Il élève les humbles, il renverse les puissants de leurs trônes. »

Le second enseignement de cette première phrase, c’est que l’essentiel échappe aux puissances mondaines, l’essentiel se passe ailleurs, discrètement, dans un désert. Là va naître dans l’humilité ce qui changera le monde bien autrement que le pouvoir bruyant et brutal d’Hérode ! L’essentiel ne fait pas de bruit. La vraie grandeur est souvent cachée, dans le secret des déserts et dans la conversion des cœurs. Le reste n’est bien souvent que sable. Autrement dit : le désert n’est pas là où on le croit !

Tout ça suggéré en une phrase. Luc excelle dans cet art.

Ensuite il nous parle du ministère de Jean-Baptiste. Que fait-il ? Il parcourt la région du Jourdain et il proclame la conversion. Mais Luc précise : il proclamait un baptême de conversion comme il est écrit dans le livre d’Isaïe : « A travers le désert, une voix crie : préparez le chemin du Seigneur. » Vous remarquez que c’est un peu bizarre de crier dans le désert, à quoi ça sert ? Dans un désert il n’y a personne pour vous entendre ! Ca n’a pas de sens ! Par contre quand on lit Isaïe que cite Jean-Baptiste, on lit : « Une voix crie : à travers le désert, préparez les chemins du Seigneur. » Ca change tout ! Le désert dont il est question, c’est le désert de Syrie qui séparait la Terre Promise des fleuves de Babylone où était exilé le peuple hébreu du temps d’Isaïe. Et donc pour revenir au plus court en Terre Promise, pour que cesse l’exil, il faut traverser le désert. Quand Jean-Baptiste cite Isaïe, il dit que notre conversion, la fin de notre exil, c’est combler les ravins de nos scepticismes, abaisser nos montagnes d’orgueil, c’est ça préparer le chemin du Seigneur, car Il vient, mais que d’obstacles en nos cœurs ! Et laisser venir le Seigneur en nous, voilà la fin de l’exil, voilà notre terre promise, non plus un pays, mais sa compagnie. Notre terre promise, c’est que Dieu est proche de nous et nous proches de Dieu.

Comprenant cela, nos cœurs et nos intelligences ne seront plus secs comme le désert. Nous serons d’autant mieux délivrés de l’exil que nous saurons que Dieu préfère venir dans les simples choses, rarement dans les puissances. Il choisit les cœurs les plus disposés, les choses les plus simples pour venir. Parfois même, il vient sous l’apparence du pain consacré et partagé. Etrange puissance que celle de notre Dieu qui se fait si petit.