Les rites de la messe [3/4]

dimanche 23 janvier 2005.
 

Après avoir fait une introduction sur la fonction des rites, puis une explication des rites de l’autel, nous voyons aujourd’hui tout ce qui touche à l’ouverture de la messe, les rites de préparation.

La célébration de la messe commence avec la procession d’entrée. Ce mouvement exprime celui de toute l’Eglise, de tout chrétien, il refait en geste ce que l’architecture exprime dans son orientation. Les églises, vous le savez, sont orientées, c’est-à-dire tournées vers l’Orient, lieu du soleil levant, signe du Christ ressuscité, vainqueur des ténèbres. La procession d’entrée consiste à orienter toute l’assemblée vers le Christ . Le prêtre venant du fond de l’église, en principe précédé de l’encensoir puis de la croix entourée de deux cierges, traverse toute l’assemblée et la présente au Christ. Une ancienne explication dit que c’est là, l’image de la venue du Christ en notre humanité, pour la conduire au Père.

Jusqu’au IXe siècle, on avait beaucoup de processions dans les églises. Dans la liturgie carolingienne, on se déplaçait beaucoup, du narthex jusqu’à l’autel, de l’autel jusqu’au centre de l’église où se dressait une croix, une autre procession pour l’Evangile. C’était une liturgie très mobile, mais cette coutume a disparu au XIIIe. La liturgie se rétracte, se retire dans le sanctuaire et l’assemblée n’est plus trop concernée par ce qui se passe dans le chœur qu’on a d’ailleurs entièrement clôturé, c’est ce qu’on appelle un jubé. Les prêtres et la chorale se tenaient à l’intérieur, les autres, derrière les clôtures. Dans la nef, on allait et venait, il y avait du bruit constamment, d’autant que les gens n’entendaient plus la messe, il n’y avait pas de sonorisation, bien sûr, en plus, ils ne la comprenaient plus. D’ailleurs, petit détail en passant, vous savez probablement que l’habitude existe de sonner une petite clochette au moment de l’élévation, quand le prêtre montre l’hostie consacrée. Cette sonnerie était faite pour que les gens arrêtent leurs occupations pour faire attention, après ils reprenaient, les uns leurs prières, les autres hélas, leurs bavardages ! Après le concile de Trente, au XVIIe, les choses ont bien changé. Il y a alors un véritable souci que les chrétiens voient ce qui se passe, participent d’avantage. On dispose des bancs, ce qui a restauré un peu de discipline et c’est ce qui a permis à nouveau la procession d’entrée.

Bref, le rite de la procession est donc un moyen de constituer l’assemblée et de l’orienter vers le Christ.

Au terme de la procession, vous voyez les célébrants vénérer l’autel. Après avoir traversé l’assemblée, en quelque sorte, ils la réfèrent, ils l’attirent jusqu’à ce lieu d’où elle va recevoir ce qui la constitue. C’est une manière de traduire ce que dit St Pierre dans sa première lettre : « C’est en vous approchant de Lui, pierre vivante, choisie et précieuse devant Dieu, que vous aussi, comme des pierres vivantes, vous êtes édifiés en maison spirituelle pour constituer une assemblée sainte. »

Voilà pour la procession d’entrée.

Le prêtre ensuite gagne sa place. Il ne préside pas la prière de l’autel ou de l’ambon qui ont leurs usages réservés, il a un siège sur le côté en principe. La prière commence par le signe de la croix qui rappelle que nous sommes réunis au nom de notre Dieu. Vient alors la prière pénitentielle. Elle est un sas de préparation, une disposition intérieure. Elle exprime deux choses. En effet, nous sommes pécheurs, nous ne faisons pas le bien que nous devons et nous faisons le mal que pourtant que nous ne voulons pas, le reconnaître, ça n’est pas quelque aspect malsain de nos psychologies, c’est la vérité de nos existences. Nous avons besoin du secours de Dieu, de sa force pour lutter. Depuis le jansénisme, les catholiques ont tendance à penser que pour communier, ils doivent être purs, les chrétiens d’Orient eux, pensent plutôt que c’est le sacrement de l’Eucharistie qui les rend purs. Toujours est-il que cette démarche pénitentielle comporte ce premier aspect, se reconnaître pécheur. Le second aspect plutôt exprimé par le chant du Kyrie, c’est de dire que nous sommes en quelque sorte en décalage par rapport à ce que nous allons célébrer, le don de Dieu, la présence de Dieu. Dieu est si grand ! Il y a entre notre réalité et celle de Dieu une telle différence ! C’est également ce qui est dit par ces paroles « Seigneur, je ne suis pas digne de te recevoir, mais dis seulement une parole et je serai sauvé ! » De la même façon, le Kyrie que les orthodoxes chantent sans cesse tout au long de leur liturgie, est l’expression de notre besoin de Dieu, de notre attente, de notre désir, c’est un juste rapport à Dieu, que lui demander rien d’autre que Lui-même, comme le disait St Augustin.

C’est alors qu’est proclamé le Gloire à Dieu. C’est une exultation parce que nous sommes sûrs de son secours, il est en quelque sorte la face lumineuse, joyeuse de la démarche pénitentielle. Il y a donc deux aspects dans cette démarche pénitentielle : premièrement nous sommes pécheurs et nous avons besoin du pardon de Dieu, deuxièmement, j’ai besoin de la grandeur de Dieu, c’est elle qui me grandit.

Voilà pour nos rites d’entrée.

J’ajoute pour finir une note sur la façon dont nous chantons le Kyrie et le gloire à Dieu, sous le mode dialogué. C’est une antique façon de prier qui exprime bien le besoin que nous avons les uns des autres, nous nous répondons. C’est particulièrement vrai du credo, là plus qu’ailleurs, nous avons besoin de dire que sans les autres avec lesquels nous sommes en communion, notre foi s’étiole. Les différentes réformes liturgiques au cours de l’histoire ont souvent cherché à favoriser la participation de tous, par ces prières dialoguées et par le chant ce qui est une autre façon de faire corps .

Bon, il faut arrêter. Il y aurait tellement de choses à dire ! La prochaine fois, nous observerons les rites concernant les lectures.