Dimanche 28 mars 2004 - Cinquième dimanche de Carême

C’est cool, comme on dit de nos jours !

Isaïe 43,16-21 - Philippiens 3,8-14 - Jean 8,1-11
dimanche 28 mars 2004.
 

Vous savez bien qu’au Moyen Age, les moines faisaient les copies des textes, c’était une de leurs activités les plus utiles pour ce qui allait devenir l’Europe. Ils copiaient en plusieurs exemplaires des textes des pères, ceux des philosophes et bien évidemment les missels et les lectionnaires. Et bien il paraît que dans bien des manuscrits, les copistes ont tout simplement oublié de copier ce texte de la femme adultère que vous venez d’entendre. Ce texte n’était plus lu dans la liturgie depuis le Concile de Trente ! Pourquoi ? Probablement parce que les difficultés soulevées par ce récit sont considérables. On ne s’en rend pas assez compte, mais ici Jésus semble absoudre l’adultère comme si tout compte fait, c’était pas si grave. Et pire, il absout cette femme sans qu’il y ait quelque démarche de repentance que ce soit ! Nulle part nous ne voyons de la part de cette femme, une demande de pardon, un regret ou une résolution à changer de mœurs, nulle part ! Alors comme ça, quoiqu’on fasse, tout va bien ? C’est cool, comme on dit de nos jours !

En fait dans cette scène, nous ne voyons pas Jésus pardonner à bon prix, nous le voyons qui tente de susciter le repentir ! C’est pas pareil, quand Jésus pardonne, il le dit : « Tes péchés sont pardonnés » et c’est toujours après une demande, une démarche.

Ici, rien de tout cela, Jésus semble se contenter de contester la condamnation et d’éveiller au repentir, c’est ce qui précède le pardon. Il éveille le repentir chez les accusateurs, il l’éveille chez cette femme.

« Je ne te condamne pas, va et ne pèche plus ». Jésus ne condamne pas, par contre il porte un jugement. Il faut vraiment apprendre à faire la différence entre juger et condamner ! Jésus ne dit pas : « c’est rien, tout va bien, c’est pas si grave » mais : « Ne pèche plus. » Autrement dit : « Tu as commis un péché, ne recommence pas ». Mais ce qu’il affirme, c’est que la miséricorde est première. Ce n’est pas le repentir qui suscite la miséricorde, c’est la miséricorde qui suscite le repentir. C’est parce que nous savons que nous ne sommes pas enfermés à jamais dans les péchés que nous avons faits, que nous pouvons nous convertir. Sinon, vous savez bien, on étoufferait sous la masse énorme de toutes ces petites médiocrités, mesquineries, avilissements. La miséricorde, ça veut dire qu’il est toujours possible de repartir, de se redresser, pourvu qu’on le veuille. Ce que le péché a ruiné en nous peut être relevé. La miséricorde de Dieu est première.

Jésus suscite aussi le repentir chez les pharisiens. « Celui qui est sans péché, qu’il soit le premier à lui jeter la pierre. » Et ils s’en vont, tous, à commencer par les plus vieux. C’est quelque chose qui m’a toujours amusé. Quand on est avancé en âge, évidemment, on en a fait des trucs pas nets ! C’est ce que je pensais quand j’étais jeune. Maintenant je crois plutôt qu’il y a un âge où on ne peut plus tromper sa conscience. Quand un gamin vous dit « c’est pas ma faute, je savais pas », on peut le croire, mais il y a un âge où ça tient plus. Jésus n’est pas en train de leur faire la morale, de les accuser, il éveille leur conscience, et ça marche mieux chez les gens d’âge mûr que chez les plus jeunes ! Et pour les scribes et les pharisiens les plus durs, les plus purs, il y a un enseignement tout spécial. Ne s’en tenir qu’au légalisme, qu’à la Loi stricte, c’est tuer la conscience. La loi n’est pas faite pour piéger, pour condamner, elle est faite pour conduire les consciences, pour éclairer la conscience. C’est ce que Jésus leur rappelle, et il les sauve, eux aussi !

Vous l’avez remarqué ni des pharisiens, ni de la femme adultère, nous ne savons s’ils ont changé leur vie, mais ce que nous savons, c’est qu’ils repartent grandis. Cette femme était déjà morte, condamnée quand on l’a jetée aux pieds du Christ, la voilà invitée à la vie. Ces pharisiens avaient tué la loi, voilà que leur conscience s’éveille. C’est une route qui s’ouvre à eux, celle de la renaissance, celle de la résurrection, celle de Pâques.

Quand la conscience s’éveille !

Jean 8, 1-11