Tout d’abord, pour bien comprendre ce texte difficile, il faut le remettre dans son contexte

samedi 28 août 2004.
 

Tout d’abord, pour bien comprendre ce texte difficile, il faut le remettre dans son contexte. Jésus vient de raconter une parabole qui met en scène un homme qui fait un grand dîner et invite largement. Or parmi ses invités, en voilà un qui préfère aller voir un champ qu’il vient d’acheter, un autre ce sont ses bœufs qu’il veut aller voir. Bref à l’invitation du maître, tous se dérobent, ils ont mieux à faire. C’est dans ce « ils ont mieux à faire » qu’est tout le problème. Et si vous voulez résumer d’un mot le texte lu aujourd’hui, on pourrait dire : « rien ne vaut mieux que le Christ ».

Mais ici les paroles de Jésus semblent plus dures ! Si vous ne me préférez pas à votre famille, si vous ne portez pas votre croix, si vous ne renoncez pas à vos biens, vous ne pouvez pas être mes disciples. Qu’est-ce que ça veut dire ? Il y a trois domaines : la famille, la croix, nos biens.

La famille. « Si quelqu’un vient à moi sans me préférer à son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères, ses sœurs, il ne peut pas être mon disciple » ! Jésus n’est pas en train de dire : « Si tu aimes ta femme, tu ne m’aimes pas ! » Il n’a rien contre la famille, bien-sûr. On le verra guérir une enfant pour la remettre à sa mère et il redira le commandement : « tu honoreras ton père et ta mère ». De même, il ne dit pas qu’à part lui, il ne faut rien aimer. Ce serait une attitude d’extrémistes qui jugent nuisible, haïssable tout ce qui n’est pas de leur côté. « Tous les autres ont tort ! », c’est le propre des intégristes. Ce n’est évidemment pas ce que dit Jésus. Il dit qu’il faut le préférer, c’est-à-dire qu’il faut le mettre au-dessus de tout, non pas pour que tout le reste soit nié, détesté, considéré comme nul, mais pour que tout soit transfiguré, habité par cet absolu qu’est Dieu et lui seul ! Ce ne sont pas les règles du clan ou les traditions qui sont des absolus, mais Dieu. Ce n’est pas la famille qui est un absolu, mais Dieu. Et Dieu peut tout habiter et tout embellir, à condition, bien sûr qu’on ne le mette pas à la dernière place.

Même explication pour les biens auxquels, nous dit-on, il faut renoncer. Là, évidemment, nous autres, occidentaux, nous sommes quand même un peu pris au piège de notre confort. Remarquez qu’à l’inverse, on n’a jamais vu que la misère ait libéré quiconque. Il ne s’agit pas de vivre dans le dépouillement, dans la misère, mais il faut prendre garde à ce que les biens que nous possédons ne finissent par nous dominer, par nous gaver. (les jeunes disent souvent « il me gave, ça m’gave » dans le sens ça me fatigue, ça m’ennuie. En effet nos bien peuvent nous gaver même dans ce sens ; ils nous ennuient, ils nous usent.

Et enfin, que veut dire : « Celui qui ne porte pas sa croix pour marcher derrière moi, ne peut pas être mon disciple » ? Je crois qu’il faut comprendre ici que la vie chrétienne implique des engagements, des combats. Des combats en nous-mêmes, contre les idéologies, contre le mal et qu’il ne faut pas en avoir peur. Si le mot « prendre sa croix » est utilisé, c’est parce que nous savons qu’en elle, il y a déjà la lumière de la résurrection.

J’ai failli oublier ces deux petites paraboles que Jésus glisse dans son discours : celui qui veut construire une tour et le roi qui part en guerre. C’est une petite leçon sur la prévoyance. Ne vous lancez pas sans avoir compté vos forces. Et Jésus applique cette attitude à ceux qui veulent être disciples. Sauf qu’ici, il ne s’agit pas de se demander si j’ai bien la force pour être disciple, si je suis assez malin, assez généreux, il ne s’agit plus de compter ses forces, de faire ses comptes, mais de savoir sur qui je peux compter et même plus, savoir ce qui compte vraiment pour moi ! Voilà non plus la prévoyance, mais la clairvoyance. Le Christ compte-il vraiment pour toi ? Si oui, alors lance-toi, le reste te sera donné, tout en toi sera transfiguré.