Cette scène est assez terrible, elle montre un visage de notre humanité qui n’est pas le plus beau. Alors que trois hommes sont mis à mort dans des conditions épouvantables, quelques-uns uns trouvent encore à rire et à se moquer. Comme pour en rajouter encore, il y a ce vil plaisir de rabaisser encore d’avantage. La moquerie. La moquerie, c’est la signature des salauds ! Bien sûr, par rapport aux souffrances physiques endurées par Jésus ce jour là, ces moqueries ne sont pas grand chose. Mais quand même dans nos vies qui ne connaissent pas de telles violences, nous savons, ceux qui en sont les victimes savent combien ces petits riens font mal. Les enfants y sont extrêmement sensibles, ça les fait pleurer, mais les adultes aussi sont blessés par ces petites paroles coupantes. Méfions-nous de ses petites moqueries au quotidien.
Dans notre texte, vous l’avez probablement remarqué, par trois fois cette moquerie revient : « si tu es le Messie de Dieu, si tu es le roi des juifs, n’es-tu pas le messie ? Sauve-toi toi-même. » Ca ne vous rappelle rien ? Il faut revenir au début de l’évangile de Luc ; les tentations au désert, là aussi le tentateur revient trois fois à la charge, avec la même tentation : « Si tu es le fils de Dieu jette-toi en bas, transforme en pain ces pierres. » Le Christ rejette cette tentation de la puissance magique et, nous dit le texte des tentations : « le diable s’éloigna de lui jusqu’au moment favorable. » C’est maintenant le moment favorable, dans la souffrance, quand la mort vient.
Pour ma part je ne pense pas que Jésus à ce moment soit tenté de faire un truc extraordinaire, un miracle magnifique, de se sauver. Depuis qu’il a décidé de monter à Jérusalem, il savait que ça finirait mal, mais probablement voulait-il tout connaître de nos peurs et de notre souffrance pour tout sauver dans la résurrection. Ce n’est pas le Christ qui est tenté, c’est nous ! C’est notre tentation qui est exprimée dans ces moqueries. Nous voudrions que Dieu soit tout puissant, qu’il fasse des miracles, qu’il nous donne du merveilleux, de l’extraordinaire, alors bien sûr on croirait en Lui ! Mais la puissance de Dieu, c’est de parler à notre cœur, c’est d’être notre compagnon, c’est de transfigurer discrètement la vie. C’est pour ça, probablement que ce texte est lu pour la fête du Christ -Roi.
Encore une chose pour finir. Ce que Jésus dit au bon larron a de quoi étonner. Pourquoi cet homme, un voyou, serait avec Jésus au paradis ? Privilège incroyable et unique dans l’évangile ! Je ne sais pas très bien comment se passent les admissions au paradis, mais à mon avis, il y a trois choses qui donnent à cet homme une vraie grandeur. D’abord, il est le compagnon de souffrance du Christ, c’est déjà quelque chose. Ensuite, et ça c’est vraiment extraordinaire, ce bon larron a une formidable capacité à s’indigner devant l’injustice ! Il est encore capable, alors qu’il souffre, de se rendre sensible à autrui. Mais surtout, alors que tout semble perdu, il espère encore : « Souviens-toi de moi quand tu viendras inaugurer ton règne. » Il met son espérance dans un homme crucifié ! Cet homme là, à la différence des autres qui se moquent si facilement, a fort bien compris que le Règne n’a rien à voir avec quelque coup de force ou miracle merveilleux. Il a compris que ce Jésus n’est pas Tout puissant comme notre monde exerce la puissance. En vérité, c’est peut-être ça le règne de Dieu : malgré les épreuves, envers et contre tout, nous donner encore des raisons d’espérer.
Que ton règne vienne !