Cette histoire de la visite des mages à l’enfant Jésus est un thème extrêmement populaire. A vrai dire, la plupart y voit l’occasion de partager une galette, ce qui n’est pas mauvais. Et puis, on est prêt à s’attendrir sur cet enfant né dans la pauvreté à qui on apporte des présents de rois ! Tout ça fait rêver, c’est un joli conte de fée.
A vrai dire derrière cette belle histoire, il y a quelque chose de redoutable. Le plus important de ce texte nous sera donné si on compare les personnages en présence. Nous avons Hérode d’un côté, avec ses conseillers, de savants scribes, et de l’autre côté, des mages venus d’Orient. Des savants aux aussi, un peu astrologues, un peu philosophe, riches, peut-être des princes.
Ces deux groupes sont mis en présence à Jérusalem et s’informent mutuellement. Les mages veulent un lieu précis et non plus seulement une vague direction indiquée par une étoile, la réponse viendra des scribes. Les scribes et Hérode veulent une date, la réponse viendra des mages.
Ce qui est curieux et consternant, c’est que les scribes, conseillers d’Hérode ont la bonne réponse, ils savent où doit naître le Messie, c’est dans l’Ecriture et ils la connaissent plutôt bien. Mais ils ne font rien. Pour avoir la réponse, c’est compliqué, il faut connaître deux livres : le livre de Michée (5,1) et le second livre de Samuel (5,2). Qu’est-ce qu’ils sont savants tout de même ! Oui, mais ils ne bougent pas !
C’est là, la plus grande différence entre ces deux groupes. Les uns savent, les autres cherchent. Les uns sont immobiles, les autres bougent, les uns sont ternes, les autres enthousiastes. D’un côté, on a des gens qui ratent tout, enfermés dans un savoir, pleins de certitudes immobiles. De l’autre côté, on a des chercheurs. Entendez-moi bien, le texte ne critique pas du tout les scribes parce qu’ils sont savants, les mages aussi sont des savants, mais eux, ils n’arrêtent jamais de chercher, ils se déplacent, ils font des kilomètres, ils quittent leur pays, ils scrutent le ciel, ils font des enquêtes. Les scribes ne font rien, ils ont la vérité, ils savent.
Quelle est notre attitude par rapport à Dieu qui est la vérité ? Sommes-nous les détenteurs de cette vérité ? Si oui, nous rendons la vérité prisonnière de nos intelligences limitées. Scribes. Ou bien, sommes-nous sans cesse en quête de ce qui nous dépasse infiniment ? Côté scribe ou côté mage ?
Peut-être que nous sommes de ceux qui se disent que tout ça, ce sont des trucs d’intello. Après tout, à chacun sa vérité, on se contente de petites idées. Ceux qui sont dans ce cas ne sont ni du côté des mages ni du côté des scribes. Ils sont du côté d’Hérode, ce malade qui dès qu’on touchera à ses petites certitudes, prendra peur et fera massacrer les enfants de Bethléem. Voilà où conduisent les petites certitudes, toutes faites : la peur et la violence.
Peut-être aussi sommes-nous de ceux qui trouvent bizarre cette vérité qu’on n’atteint jamais, comme un horizon qui recule toujours. Dieu qui est vérité, n’est pas un horizon qui recule toujours, mais il est cet appel, cette soif, cette aspiration qui nous met debout et nous fait marcher. Aspiration qui n’est jamais comblée tant que nous sommes ici-bas, mais qui nous fait vivre, car se dresser et marcher, chercher Dieu, c’est vivre. Les scribes sont morts et leur savoir avec eux. Les mages quand ils viennent du bout du monde jusqu’à Bethléem, rencontrent la vie et la joie.
Aujourd’hui, nous sommes mis face à ceux qui savent et ne bougent pas et face à ceux qui cherchent. Que Dieu nous aide à toujours nous tenir dans le groupe de ceux qui le cherchent. C’est là qu’est la vie.