La dernière parole du Christ est quand même un peu rude ; "celui qui me reniera devant les hommes, moi aussi je le renierai devant mon Père". C’est tellement peu dans les habitudes de Jésus ! Qu’est-ce que ça veut dire ? Il a bien pardonné à Pierre, pourquoi ne nous pardonnerait-il pas nos petites lâchetés, vous savez quand on n’ose rien dire quand on a peur de témoigner, de dire notre foi ? Pourquoi une parole d’une telle brutalité ? De quoi s’agit-il ?
Je crois que pour bien comprendre, il faut partir du versant positif de ces paroles : "celui qui se prononcera pour moi devant les hommes, moi aussi je me prononcerai pour lui devant mon Père". Il faut prendre garde à ne pas interpréter de travers. Jésus n’est pas en train de noter nos attitudes pour nous rendre à valeur égale tout ce que nous aurions fait. Il nous dit comment nous devenons Fils de Dieu. Il nous indique ce qu’il nous faut faire pour être dans la proximité de Dieu. Plus nous nous prononçons pour Dieu, plus Dieu s’enracine en nous. Plus nous le disons, plus il est là. Ca ne veut pas dire que la foi en Dieu serait comme ces slogans qui traînent partout et qui sont admis pas tous parce que tout le monde les répètent. Ces demi vérités qui deviennent vraies à force de les rabâcher. La foi ne fait pas partie de ces idées que l’on répète bêtement parce que tout le monde le fait.
Par contre en effet, quelque chose de Dieu s’édifie en nous si nous l’annonçons. Et si nous ne l’annonçons pas quelque chose de Dieu meurt en nous, oublié, éteint. Le fait de dire Dieu consolide Dieu en nous. Dieu est là, en nous, secrètement, mais cette présence grandit en nous si nous l’acceptons, si nous la nourrissons et le Christ nous dit que pour nourrir en nous sa présence, le meilleur moyen, c’est de parler de Lui. Nous avons en nous cette étrange capacité de faire grandir Dieu en nous ou de l’éteindre !
Et quand Jésus dit : "celui qui me renie devant les hommes, moi aussi je le renierai", il ne veut pas dire qu’il tient des comptes et qu’un jour, il se vengera. Il veut nous dire que pour que Dieu nous reconnaisse, lors du jugement, il faut qu’il y ait en nous quelque chose que Dieu puisse reconnaître, quelque chose qu’il connaisse bien puisque Il l’a lui-même déposé en nous. Avons-nous effacé tout à fait en nous cette trace de Dieu ? Alors rien entre nous et Dieu ne pourra être un point d’accord. Ce n’est pas que Dieu se venge de nos lâchetés, mais c’est qu’à force d’accumuler les lâchetés, nous avons perdu l’humanité en nous, nous ne pesons plus rien.
St Paul a réfléchi à ça et voici ce qu’il écrit à Timothée : "si nous le renions, lui aussi nous reniera. Si nous lui sommes infidèles, lui demeure fidèle, car il ne peut se renier lui-même".
Quelque soit notre état, même si l’image de Dieu en nous a été corrompue, usée, abîmée, oubliée, Dieu ira jusqu’au plus profond de nous-mêmes pour sauver la plus petite braise et la réveiller.
Voilà comment comprendre cette parole de Jésus bien dure à entendre, en vérité.
Maintenant, il y a une deuxième chose sur laquelle je voudrais attirer votre attention. "Ce que je vous dis dans l’ombre, dites-le au grand jour, ce que vous entendez dans le creux de l’oreille (c’est-à-dire dans le secret), proclamez-le sur les toits."
Dieu nous parle dans l’ombre, dans le secret. Ce que je vous dis là, Dieu l’a déjà soufflé à votre oreille, c’est déjà en vos coeurs, secrètement enfoui. Le métier de prédicateur, de prêtre ne consiste pas à vous apprendre des choses. Tant mieux si vous apprenez quelque chose en m’écoutant, mais ce que je fais et ce que doivent faire les disciples consiste à réveiller en vous et en tout homme ce qui se tient dans le secret des coeurs, que vous ne connaissez peut-être pas encore clairement mais qui cependant est vôtre. Ce que Dieu vous a confié au creux de l’oreille, au secret du coeur, dans l’ombre, proclamez le. En annonçant Dieu, en parlant de Dieu, vous le connaîtrez. Cette annonce que vous ferez vous révélera à vous-mêmes, vous révèlera votre part la plus haute, ce qui est plus intérieur à vous que vous-mêmes, l’humble présence de Dieu. Dieu n’est pas un juge qui tient des comptes, il est discrète présence en vous. Nourrissez cette présence, annoncez le Christ.