Nous avons aussi bien avec Daniel que dans l’évangile de ce jour, des textes d’un genre littéraire bien connu, le genre apocalyptique. Ce ne sont pas là des discours faits pour effrayer, mais ils nous invitent à changer notre regard, notre conviction. C’est un discours très codé, auquel un auditoire juif est assez habitué. L’obscurcissement du soleil et de la lune, la pluie des étoiles c’est une manière de dire que tout passe, même les choses apparemment les plus stables. Ce qui est pérenne, sûr, stable, malgré les apparences, ce ne sont pas les astres dont beaucoup dans l’antiquité faisaient des dieux, ce qui est sûr, c’est la venue du Royaume !
Dans la seconde partie, il y a d’abord cette image du figuier et ses branches qui deviennent vertes, enfin quelque chose de frais dans toutes ces évocations de violences et de turbulences. Le figuier est mentionné quatre fois dans les évangiles ; un homme qui a un figuier planté au milieu de sa vigne, deux arbres dont le symbolisme est constant dans toute l’Ecriture, la vigne, c’est Ie peuple élu, le figuier c’est la Torah. Et puis vous avez aussi cette fameuse affaire où nous voyons Jésus maudire un figuier qui se trouve desséché en quelques heures. Et puis Nathanaël à qui Jésus dit, « je t’ai vu sous le figuier ». Et enfin, cette allusion que nous avons aujourd’hui.
Dans les évangiles, à chaque fois qu’on parle du figuier, c’est de la Parole de Dieu dont il est question. Le Midrash Rabba le dit de très belle manière : « Pourquoi la Parole est-elle comparée au figuier ? Parce que la plupart des arbres, l’olivier, la vigne, le dattier, sont tous cueillis en une seule fois, d’une seule récolte, alors que le figuier est cueilli petit à petit, le mûrissement de ses fruits s’étale longuement. Ainsi la Torah. Aujourd’hui, on apprend un peu, demain encore, beaucoup ensuite. » n Le figuier, c’est la Parole et donc...
Quand Jésus dit : « lorsque vous verrez cela arriver, sachez que le Fils de l’homme est proche, à votre porte », il ne parle pas des cataclysmes de la fin des temps, ça ne l’intéresse pas, il n’en connaît pas l’heure, il l’a dit lui-même ! Quand il dit : « Vous verrez cela arriver », il parle du figuier qui fleurit, entendez : la parole qui donne ses fruits. Imaginez l’évangéliste St Marc qui recopie ces mots ! Il l’a vu, lui, cette parole qui portait du fruit, lui qui quelques années après la mort et la résurrection du Christ a été compagnon de St Paul, puis de St Pierre, il a vu l’évangile annoncé jusqu’à Rome ! Il a vu aussi « cette génération disparaître », c’est-à-dire la génération des apôtres ! Il les a vu disparaître, mais pas la Parole ! C’est pourquoi il a pris grand soin de noter cette phrase si énigmatique : « Cette génération ne passera pas avant que tout cela n’arrive » ! Avant que le figuier ne porte du fruit.
Certes, comme le disait la première partie de ce texte, tout faut le camp ! Tout passe, mais pas la Parole ni celui qui est habité par elle. Quand nous entendons la Parole de Dieu, qu’elle habite en nos cœurs, alors le Fils de l’homme est à notre porte, tout proche C’est bien ce que reconnaît Pierre qui dit « à qui irions-nous Seigneur, tu as les paroles de la vie éternelle. »
Toutes ces descriptions apocalyptiques et ce signe fragile du figuier pour nous dire : n’allons pas vers toutes ces choses qui ne durent pas, n’y mettons pas notre cœur, mais laissons la Parole venir en nous, elle est vie éternelle.
Du figuier... Marc 13, 24-32.