Nous retrouverons cette lecture de l’évangile pour le dimanche de Pentecôte. Nous la méditerons donc dans 15 jours. Je voudrais vous parler de la seconde lecture, le texte de l’Apocalypse. C’est un livre très codé, très symbolique mais pas si compliqué qu’on le dit. L’ensemble du livre nous dit quelle est l’espérance chrétienne. Il nous explique d’abord, que malgré les apparences - quand le livre a été écrit, on était en pleine période de persécution- malgré les apparences, le mal ne doit pas régner sur le monde. L’apocalypse annonce que le mal sera vaincu. Evidemment, ça n’ira pas sans combat, et c’est à cause de ces images de combats qu’on a fait de ce livre un texte un peu terrifiant. Et donc, contrairement à ce qu’on croit souvent, le livre de l’Apocalypse ne décrit pas la fin des temps dans des destructions fantastiques, monstrueuses, il essaie de dire quelle est non pas la fin mais la finalité, le but. Et le but c’est que nous soyons tous en Dieu. Bien sur, toute chose disparaîtra, St Jean avait déjà clairement perçu ça, toute chose disparaîtra, sauf Dieu, or nous serons en Dieu. Voilà la clef pour comprendre ce livre.
Alors comme c’est un livre très imagé, l’art chrétien l’a abondamment illustré, surtout au Moyen-Age. Il y a beaucoup de fresques dans les églises, beaucoup de manuscrits qui sont incompréhensibles si on n’a pas lu l’Apocalypse. Or, figurez-vous que le texte que nous avons entendu en seconde lecture a été illustré vers l’an Mil, en France, à St Benoît sur Loire, nous pouvons encore le voir. Ce n’est pas une fresque, ni une mosaïque, ni une sculpture, mais une architecture. On a là bas, à quelques kilomètres d’Orléans une énorme tour, à l’époque construite au centre d’une grande forêt impénétrable, mais par la Loire, on pouvait accéder à un monastère qui possédait une école c’est-à-dire une université. Le monastère, l’université, la tour sont en quelque sorte une mise en œuvre de l’Apocalypse. Comme c’est bizarre !
Le monastère, c’était affirmer que la prière est une lumière pour le monde, que la présence de Dieu peut tout transfigurer.
L’université. Mais oui, on croyait en effet que par l’étude, on pouvait vaincre le mal. On étudiait tout ce qu’on pouvait, il y avait une énorme bibliothèque, on travaillait la philosophie, la théologie, la médecine, les sciences. C’était une extraordinaire promotion de l’intelligence. On avait bien compris que la sottise était la source principale des fléaux qui ravagent notre monde. Par l’étude, on combat le mal.
Et la tour ? Une énorme tour carrée, de plus de quinze mètres de côté, 20 mètres de haut. La tour est un commentaire de cette lecture que nous avons entendue. C’est à la fin du livre de l’apocalypse, la partie la plus heureuse, joyeuse lumineuse du livre. C’est ce que je vais vous expliquer maintenant.
On nous dit dans ce texte que la Jérusalem Céleste, c’est-à-dire ce à quoi nous sommes destinés, notre demeure, descend du ciel. Grande et haute muraille. En effet cette tour est grande et haute. A l’époque, une muraille, c’est ce qui protège des guerres, des ennemis. A l’intérieur, on est en paix, on ne craint plus les dangers. C’est la garantie de la victoire contre le mal. Mais voilà, elle est percée de douze portes, trois vers le Sud, trois vers le Nord, trois vers l’Ouest, trois vers l’Est. C’est pour que tout le monde puisse y accéder. Ce lieu de paix est destiné à tous, au monde entier. A Saint Benoît, on retrouve ces douze portes et la tour est portée par douze colonnes énormes, ce sont les douze apôtres, nous dit le texte, c’est-à-dire que c’est une image de l’église fondée sur les douze apôtres. C’est par eux qu’a été annoncée la résurrection, c’est sur leur foi qu’est fondée la nôtre, ils sont les racines, les colonnes de l’Eglise dont nous sommes les pierres vivantes.
Si vous vous souvenez, il nous est dit aussi que dans la Jérusalem céleste, il n’y aura plus de temple, plus d’église ! En effet, nos églises sont le lieu où on célèbre la venue du Christ, où on réveille, on nourrit notre espérance en Dieu. Quand nous serons en Dieu, nous n’aurons pas besoin de célébrer sa venue parmi nous, nous serons en Lui. Nous ne célèbrerons plus le sacrement de la Communion, nous serons en communion avec lui. Les chrétiens d’Orient disent volontiers que nos liturgies sont l’avant-goût du ciel. Ils nous donnent le goût, l’envie de Dieu. C’est pas si mal.
Voilà ce que nous dit ce texte de l’apocalypse et voilà ce que nous dit la tour de St Benoît sur Loire. Quand les bâtisseurs de l’an Mil ont construit cette tour, ils ont fait une formidable homélie. Si nous ne sommes pas encore en Dieu, notre espérance, elle est déjà là et elle peut changer nos vies, changer le monde.
Fin de la visite guidée.
Et si vous n’avez pas tout compris, et bien, puisque c’est bientôt l’été et le temps des vacances, allez donc à St Benoît, et là, priez pour vos prêtres, prenez-en soin, si j’ose dire, n’oubliez pas le guide.